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MERDALOR
( L’histoire du fils Deveaut )
( N'IMPORTE COMMENT )
Joseph Margueritte à la jeune femme :
« N’importe comment vous pouvez pas vous tromper, c'est
comme qui dirait, tout droit.
— Comme qui dirait... ?
— Toujours tout droit.
— Toujours…?
— Attention quand'te je dis “ toujours ”, en gros j'exagère,
mais grosso modo.
— Grosso modo…?
— Grosso modo comme vous allez pas y prenre à vol
d’oiseau c'est presque vraiment tout droit.
— Presque vraiment…?
— Grosso modo. N'importe comment, au croisement du
grand chêne ce sera à gauche et puis...
— Au croisement du grand chêne... ?
— Vous faites bien de me reprendre. Y a pas de mal à ça.
Excusez-moi si je vais trop vite en besogne.
Au croisement du grand chêne, faut pas vous attendre à
trouver d'chêne, ni petit ni grand, ça fait belle lurette qu'il y a
plus d'chêne mais le nom lui est resté.
Si une supposition vous arrivez à un croisement où il y a un
chêne... vous chagrinez pas, vous êtes allée trop loin ou
quelque chose.
Vous faites juste un demi-tour et puis vous roulez jusqu'à ce
que vous retombiez sur le croisement du grand chêne, et
là…
— Et là…?
— Et là, là là là là là, vous tournerez à gauche... enfin à
droite vu que vous venez de faire demi-tour. »
La jeune femme :
« Eh bien bonjour ! »
J. Margueritte vers la salle :
« Quand'te je dis que ça fait belle lurette qu'il y a plus
d'chêne, c’est qu'il a quand même été abattu avant l'arrivée
des Allemands et qu'il a fini en bois d'cheminée en partie par
les Allemands. »
La jeune dame à Magui :
« Oui bon, bien mais... ce fameux croisement sans chêne, il
est loin ? »
— D'accord.
— Le croisement du grand chêne, c'est loin ?!
— D'accord. J’aimerais bien vous dire que c’est pas très loin
très loin, mais personnellement, vous me poseriez la
question, pour être honnête, je vous dirais que c’est plus ou
moins près, ou plus ou moins loin.
— Si je vous comprend, c’est loin tout en étant pas loin.
J. Margueritte vers salle :
« J'avais comme qui dirait, l’impression qu'elle avait comme
une légère tendance à s'énerver.
Mais j'ai fais comme si de rien n'était, j'ai rien contre les
parisiens, ils ont des circonstances.»
À la jeune femme :
« Disons, pour vous être précis, c’est surtout suivant si on
est à pieds ou motorisé. »
La jeune femme vers la salle :
« J'étais mal barrée. »
J. Margueritte à la jeune femme :
« Une suposition que vous avez bien suivi mes indications à
la lettre et que vous êtes au croisement, le plus dur est
derrière vous.
Vous n'aurez plus qu'à aller tout droit. Puis, puis vous ferez
attention le moment venu de bien tourner carrément à
gauche. Vous pouvez aller à droite aussi, mais vous avez
encore plus de chance de vous tromper. »
— Bonjour !
— Enfin pour vous en finir : si ça peut vous rassurer c’est
quasiment tout droit, à peu de chose près et vous tombez
direct sur Culan...
J. Margueritte vers la salle :
« Elle avait l'air soucieuse ou quelque chose, allez savoir
pourquoi. Alors je lui dis :
‘’Ah ! vous avez de la chance, parce que, une supposition
que vous seriez pas tombée sur Monsieur Magueritte, une
supposition, vous étiez mal partie pour trouver le raccourci
que je vous ai dis. Moi j'ai pas de mérite d'y savoir, c'est là
que j'habite. »
La jeune femme vers salle :
« C’est la qu’il me lance : ‘’Moi j'ai pas de mérite d'y savoir,
c'est là que j'habite’’. Je lui demande de répéter ce qu’il
venait de dire. »
J. Margueritte vers la salle :
« Elle me demande où c'était que j'habitais. Alors je lui dis
que c'est là que j'habite, à Culan, c'est pas un secret.
J'ai bien cru qu’elle allait se trouver mal...
Et puis elle me dit quelque chose comme : « Qu'est-ce que
je faisais sur la route ? »
J. Margueritte à la jeune femme :
« Ce que je fais sur le bord de la route ? Vous êtes drôle,
j’étais monté à la ville et mon car pour rentrer m'est passé
sous le nez. À une minute près, merd'alors ! Tout ça à cause
d'une histoire qu'il serait trop long que je vous y raconte...»
La jeune femme vers la salle :
« Je lui demande s’il attendait le prochain car ?!
Il me répond : Non non non non non, c'était le dernier
Remarquez c'est pas grave je fais marcher les guibolles,
elles en ont vu d'autres.
J'aurais bien tenté de faire de l’autostop, mais à c't'heure, les
automobiles il y en plus guère...»
J. Margueritte vers la salle :
« Elle me demande si j’aurais fait de l’autostop ça aurait été
pour aller où ?
Je lui dis, pour aller chez moi pardi, où c'est que vous voulez
que j'aille ! Chez moi, à Culan pardi. »
La jeune femme vers la salle :
« Bonjour ! il était trop le mec ! Je meurs ! »
À J. Margueritte :
« Vous ne pouviez pas le dire plus tôt ! »
J. Margueritte Margueritte vers la salle :
« Merd'alors c'est qu'elle m'aurait presque enguirlandé ! »
À la jeune femme :
« Bein, vous me l'auriez demandé, une supposition... J'ai
rien à cacher. Une suposition que vous me l’auriez
demandé, mais vous me l'avez pas demandé. »
La jeune femme vers la salle:
« Bonjour ! »
À J. Margueritte :
« C'est bien, montez je vous prends.»
— D'accord.
— Montez, je vous prend en stop. En autostop, montez !
Joseph Margueritte vers la salle :
C'est là qu'elle me propose gentiment de me prendre dans
sa voiture.
À la jeune femme :
— En autostop ?! Ah c'est très aimable ! Je n'me ferais pas
prier deux fois, une supposition que vous changiez d’avis.
En y réfléchissant... ça pourrait vous éviter que que vous
vous égariez... Je n'dis pas que vous vous seriez égarée,
mais on est jamais à l’abri. »
Vers la salle :
« J'ai vraiment eu d'la chance, même si j’ai pas eu de
chance. J'ai raté le car, ça c'est la faute à pas d'chance. Et
puis y a la jeune dame, très aimable très sympathique, elle
me propose qu'elle me prenne en autostop pour m'amener
chez moi, j'y avais rien demandé, je pouvais pas lui dire non.
Ça c'est de la chance. »
La jeune femme vers la salle :
« Il monte dans ma voiture, et alors le trajet bonjour ! je vous
raconte pas. »