3 MERDALOR ( L’histoire du fils Deveaut ) ( N'IMPORTE COMMENT ) Joseph Margueritte à la jeune femme : « N’importe comment vous pouvez pas vous tromper, c'est comme qui dirait, tout droit. — Comme qui dirait... ? — Toujours tout droit. — Toujours…? — Attention quand'te je dis “ toujours ”, en gros j'exagère, mais grosso modo. — Grosso modo…? — Grosso modo comme vous allez pas y prenre à vol d’oiseau c'est presque vraiment tout droit. — Presque vraiment…? — Grosso modo. N'importe comment, au croisement du grand chêne ce sera à gauche et puis... — Au croisement du grand chêne... ? — Vous faites bien de me reprendre. Y a pas de mal à ça. Excusez-moi si je vais trop vite en besogne. Au croisement du grand chêne, faut pas vous attendre à trouver d'chêne, ni petit ni grand, ça fait belle lurette qu'il y a plus d'chêne mais le nom lui est resté. Si une supposition vous arrivez à un croisement où il y a un chêne... vous chagrinez pas, vous êtes allée trop loin ou quelque chose. Vous faites juste un demi-tour et puis vous roulez jusqu'à ce que vous retombiez sur le croisement du grand chêne, et là… — Et là…? — Et là, là là là là là, vous tournerez à gauche... enfin à droite vu que vous venez de faire demi-tour. » La jeune femme : « Eh bien bonjour ! » J. Margueritte vers la salle : « Quand'te je dis que ça fait belle lurette qu'il y a plus d'chêne, c’est qu'il a quand même été abattu avant l'arrivée des Allemands et qu'il a fini en bois d'cheminée en partie par les Allemands. » La jeune dame à Magui : « Oui bon, bien mais... ce fameux croisement sans chêne, il est loin ? » — D'accord. — Le croisement du grand chêne, c'est loin ?! — D'accord. J’aimerais bien vous dire que c’est pas très loin très loin, mais personnellement, vous me poseriez la question, pour être honnête, je vous dirais que c’est plus ou moins près, ou plus ou moins loin. — Si je vous comprend, c’est loin tout en étant pas loin. J. Margueritte vers salle : « J'avais comme qui dirait, l’impression qu'elle avait comme une légère tendance à s'énerver. Mais j'ai fais comme si de rien n'était, j'ai rien contre les parisiens, ils ont des circonstances.» À la jeune femme : « Disons, pour vous être précis, c’est surtout suivant si on est à pieds ou motorisé. » La jeune femme vers la salle : « J'étais mal barrée. » J. Margueritte à la jeune femme : « Une suposition que vous avez bien suivi mes indications à la lettre et que vous êtes au croisement, le plus dur est derrière vous. Vous n'aurez plus qu'à aller tout droit. Puis, puis vous ferez attention le moment venu de bien tourner carrément à gauche. Vous pouvez aller à droite aussi, mais vous avez encore plus de chance de vous tromper. » — Bonjour ! Enfin pour vous en finir : si ça peut vous rassurer c’est quasiment tout droit, à peu de chose près et vous tombez direct sur Culan... J. Margueritte vers la salle : « Elle avait l'air soucieuse ou quelque chose, allez savoir pourquoi. Alors je lui dis : ‘’Ah ! vous avez de la chance, parce que, une supposition que vous seriez pas tombée sur Monsieur Magueritte, une supposition, vous étiez mal partie pour trouver le raccourci que je vous ai dis. Moi j'ai pas de mérite d'y savoir, c'est là que j'habite. » La jeune femme vers salle : « C’est la qu’il me lance : ‘’Moi j'ai pas de mérite d'y savoir, c'est là que j'habite’’. Je lui demande de répéter ce qu’il venait de dire. » J. Margueritte vers la salle : « Elle me demande où c'était que j'habitais. Alors je lui dis que c'est là que j'habite, à Culan, c'est pas un secret. J'ai bien cru qu’elle allait se trouver mal... Et puis elle me dit quelque chose comme : « Qu'est-ce que je faisais sur la route ? » J. Margueritte à la jeune femme : « Ce que je fais sur le bord de la route ? Vous êtes drôle, j’étais monté à la ville et mon car pour rentrer m'est passé sous le nez. À une minute près, merd'alors ! Tout ça à cause d'une histoire qu'il serait trop long que je vous y raconte...» La jeune femme vers la salle : « Je lui demande s’il attendait le prochain car ?! Il me répond : Non non non non non, c'était le dernier Remarquez c'est pas grave je fais marcher les guibolles, elles en ont vu d'autres. J'aurais bien tenté de faire de l’autostop, mais à c't'heure, les automobiles il y en plus guère...» J. Margueritte vers la salle : « Elle me demande si j’aurais fait de l’autostop ça aurait été pour aller où ? Je lui dis, pour aller chez moi pardi, où c'est que vous voulez que j'aille ! Chez moi, à Culan pardi. » La jeune femme vers la salle : « Bonjour ! il était trop le mec ! Je meurs ! » À J. Margueritte : « Vous ne pouviez pas le dire plus tôt ! » J. Margueritte Margueritte vers la salle : « Merd'alors c'est qu'elle m'aurait presque enguirlandé ! » À la jeune femme : « Bein, vous me l'auriez demandé, une supposition... J'ai rien à cacher. Une suposition que vous me l’auriez demandé, mais vous me l'avez pas demandé. » La jeune femme vers la salle: « Bonjour ! » À J. Margueritte : « C'est bien, montez je vous prends.» — D'accord. — Montez, je vous prend en stop. En autostop, montez ! Joseph Margueritte vers la salle : C'est là qu'elle me propose gentiment de me prendre dans sa voiture. À la jeune femme : — En autostop ?! Ah c'est très aimable ! Je n'me ferais pas prier deux fois, une supposition que vous changiez d’avis. En y réfléchissant... ça pourrait vous éviter que que vous vous égariez... Je n'dis pas que vous vous seriez égarée, mais on est jamais à l’abri. » Vers la salle : « J'ai vraiment eu d'la chance, même si j’ai pas eu de chance. J'ai raté le car, ça c'est la faute à pas d'chance. Et puis y a la jeune dame, très aimable très sympathique, elle me propose qu'elle me prenne en autostop pour m'amener chez moi, j'y avais rien demandé, je pouvais pas lui dire non. Ça c'est de la chance. » La jeune femme vers la salle : « Il monte dans ma voiture, et alors le trajet bonjour ! je vous raconte pas. »